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Nouvelles de ClubLink

Le golf n’est pas qu’une question de distance

06 FEB 2019

Par Peter Mumford

Si vous avez regardé la ronde finale de l’Omnium Waste Management de Phoenix, dimanche dernier, vous avez peut-être entendu le commentateur parler du coup de départ de 344 verges frappé par Rickie Fowler. C’est bien au-delà de l’entendement pour nous tous, simples mortels, mais on a ensuite appris que ce n’était que le 81e plus long coup de départ du tournoi.  

Mais de nos jours, c’est le genre de donnée qui entre par une oreille et sort par l’autre.

D’aucuns riront: «344 verges, c’est rien, Cameron Champ frappait en moyenne cette distance toute la saison dernière.»

Les longues distances, au golf professionnel, sont devenues comme un bruit de fond qu’on n’entend plus. Les normales 4 de 500 verges et les normales 5 atteignables avec un bois de départ et un cocheur sont maintenant choses courantes sur les grands circuits masculins. Elles ont fait du PGA TOUR un festival hebdomadaire d’oiselets, où les scores quotidiens tombent régulièrement sous la barre des 65 et les gagnants affichent 20 ou plus sous la normale. 

Les parcours sont sans défenses contre l’assaut. La normale ne veut plus dire grand-chose.

Et de plus en plus souvent, j’entends des golfeurs passionnés se plaindre de ne plus pouvoir s’identifier au jeu qu’ils voient à la télé. Ce ne sont que des missiles suivis d’approches cochées.

Une des choses qui m’ont attiré au golf, dans ma jeunesse, c’était la pureté du jeu. Je ne le savais peut-être pas explicitement à l’époque, mais j’étais un enfant chétif – assez rapide sur des patins pour éviter les mises en échec mais un estropié en puissance si je m’essayais au football – et je me suis tourné vers les sports sans contact comme le golf et le tennis où l’on n’était pas obligé d’être costaud pour compétitionner, il fallait juste être bon. Le golf était un jeu où l’habileté se trouvait récompensée de façon équitable, il n’y avait pas de raccourcis et à mon grand ravissement, je pouvais y battre des gars plus grands et plus forts que moi. Mais le plus important est que je me savais capable de frapper les mêmes coups que les meilleurs golfeurs au monde.

Peut-être pas tout le temps, mais il m’est arrivé de réussir un coup de 150 verges au fer 7, tout comme Jack Nicklaus quand il a remporté le Tournoi des Maîtres en 1963.

Je n’étais alors qu’un jeunot, m’amusant avec un jeu de bâtons usagés et gagnant ce que je croyais être une fortune en travaillant comme cadet au Credit Valley Golf Club de Mississauga. Les cadets avaient le droit de jouer tous les vendredis matin avant 8 heures. On était toute une bande à se réunir très tôt au cabanon des cadets pour nous élancer sur le parcours mouillé de rosée et imiter de notre mieux les Jack, Arnie et Gary de ce temps-là.

Au début, les élans étaient désordonnés et agressifs, les résultats désastreux. Mais petit à petit, nous avons appris à nous calmer et à exercer un certain contrôle sur des balles amochées qui tendaient à courber leur trajectoire là où on ne les attendait pas. De temps à autre, un des gars parvenait à frapper sa balle très loin, en droite ligne, et tous s’exclamaient en riant. C’était exactement comme Jack (ou Arnie ou Gary).

L’idée qu’un fer 7 puisse frapper une balle à 150 verges m’est restée en tête toute ma vie. Je ne me souviens plus du nom de l’annonceur à ce Tournoi des Maîtres d’antan, mais je n’oublierai jamais sa voix disant que c’était un coup classique de Jack Nicklaus. Des années plus tard, j’ai entendu un autre annonceur dire que la plupart des pros du Circuit de la PGA n’exerçaient que 85% de leur force d’élan afin de toujours se garder un peu de puissance en réserve.

Ça m’a pris du temps à associer les deux déclarations pour conclure que Jack pouvait probablement frapper à 170 verges avec son fer 7 s’il le voulait. J’étais juste très fier, en arrivant dans la vingtaine, de pouvoir cogner une balle à 150 verges avec mon fer 7 presque à tout coup, tout comme Jack!

Les technologies donnent aujourd’hui à tous les golfeurs la capacité de frapper leurs balles plus loin qu’autrefois, mais elles permettent aussi aux meilleurs joueurs de réussir des coups qu’on aurait cru impossibles. Le fait de comparer notre jeu à ce qu’on voit maintenant à la télé est tout simplement risible. Si vous avez déjà participé à un tournoi pro-am, vous savez que le pro frappe d’un tertre à 50, 60 ou même 80 verges derrière vous et peut encore claquer sa balle plus loin que vous.

Et après, direz vous?

Et après, ça signifie que l’habileté perd du terrain comme clé du succès. Le golf professionnel est devenu un véritable concours de longs coups de départ.

Vous pourriez me servir l’argument que la distance est aussi une habileté, et c’est vrai. Mais elle a pris une telle importance dans le pointage que les autres habiletés pâlissent devant elle.

Vous pourriez aussi dire que les golfeurs d’aujourd’hui sont en meilleure forme et que les techniques modernes d’agronomie donnent de meilleures surfaces de roulement. D’accord.

Mais le golf est un jeu mettant à contribution une foule de compétences et d’habiletés. Le fait qu’on se concentre sur la distance plus que sur tout autre élément a complètement transformé le sport professionnel.

Ce n’est pas le cas pour nous autres, simples cogneurs du dimanche, qui n’excèdent pas les 160 km/h à l’élan. Je ne me suis jamais plaint de frapper mes balles trop loin. Mais je n’essaie pas de survoler de lointaines fosses de sable ni de couvrir des normales 4 au coup de départ.

Quiconque s’est déjà retrouvé dans l’assistance derrière un Tiger Woods ou un Dustin Johnson en train de frapper un coup de départ comprend la différence. Le son qu’ils émettent n’est pas le même que le mien ou le vôtre. La balle décolle de la face du bâton, grimpe dans la stratosphère et est perdue de vue. C’est un spectacle incomparable.

C’est dur, le golf, et c’est pourquoi j’aime regarder l’Omnium des États-Unis. Les joueurs peinent, et je peux m’identifier à leurs efforts. Ils font des bogeys et inscrivent des scores élevés. Ça aussi, ça vient me chercher. Chacune des habiletés des golfeurs est mise à l’épreuve et à terme, la normale a un sens.

Évidemment, chaque semaine de tournoi n’a pas à être aussi difficile que l’U.S. Open, mais les sites du PGA TOUR ne peuvent pas tous être faciles, non plus.

Pour prospérer, le golf doit attirer de nouveaux adeptes et s’approcher davantage des joueurs du dimanche. Pour que la relation fonctionne, le golf télévisé doit être plus accessible, plus près de ce que le golfeur moyen peut faire, ou aspirer réalistement à accomplir.

Le golf est un sport plus agréable à jouer et à regarder quand toutes les habiletés sont déployées et mises en valeur.

Peter Mumford est rédacteur en chef de Fairways Magazine. Suivez-le sur Twitter @FairwaysMag.